Fait main, artisanal… Que peut-on vraiment écrire ?

Que signifient vraiment les termes fait main, artisanal ou encore fabrication française ? Sur les marchés comme sur internet, ces expressions sont devenues des arguments de vente puissants… mais aussi parfois trompeurs. En tant que créateur·ice honnête, difficile de s’y retrouver. Cet article vous aide à mieux comprendre ce que dit la loi française, quelles sont les obligations pour utiliser ces termes, et comment communiquer de manière claire et transparente avec votre clientèle.

Des mots qui engagent : que veulent dire "fait main", "artisanal", "fabrication française" ?

Certaines expressions sont devenues des arguments marketing puissants. Dire qu’un produit est fait main, artisanal ou encore fabriqué en France rassure et attire. Mais ces termes ne sont pas que des formules vendeuses : ils sous-entendent un savoir-faire, une éthique, une traçabilité… bref, une promesse.

Dire qu’un objet est fait main, c’est affirmer qu’il a été façonné sans automatisation industrielle, avec l’intervention directe d’un·e humain·e à chaque étape significative de la fabrication. Cela exclut les productions semi-industrielles, même avec une finition manuelle.

Le mot artisanal, lui, renvoie à un cadre plus précis : celui de l’artisanat reconnu par l’État. Il implique que la personne qui fabrique est immatriculée à la Chambre des Métiers et de l’Artisanat et qu’elle maîtrise un métier relevant de la production manuelle.

Quant à fabriqué en France, cela suppose qu’une partie substantielle du processus de fabrication a eu lieu sur le territoire français. L’assemblage final ne suffit pas si toutes les pièces viennent de l’étranger.

Employer ces termes, c’est donc revendiquer une qualité et une éthique. Et lorsque ce n’est pas justifié, cela devient une tromperie.

La règlementation française : que dit la loi ?

En France, l’usage de termes comme "fait main", "artisanal" ou "fabriqué en France" est encadré par le Code de l'Artisanat, pour éviter que les consommateurs et consommatrices ne soient induits en erreur. Il ne suffit pas d’évoquer un travail soigné ou local pour pouvoir employer ces expressions légalement.

Fait main & artisanal : une réalité à prouver

Selon la législation, qualifier un objet de "fait main" implique une fabrication principalement manuelle, sans recours à des machines automatisées sur les étapes essentielles. Pour "artisanal", l’usage du terme suppose que le ou la fabricant·e soit immatriculé·e à la Chambre des Métiers et exerce une activité relevant de l’artisanat selon la nomenclature officielle.

Fabriqué en France : attention à l’origine

L’indication "fabriqué en France" ne peut être utilisée que si le produit a subi sa dernière transformation substantielle sur le territoire français, selon les règles douanières. Il ne suffit donc pas d’emballer un produit étranger en France pour le revendiquer comme tel.

Que risque-t-on en cas d’abus ?

Le non-respect de ces règles est considéré comme une pratique commerciale trompeuse, passible de sanctions. L’article L132-2 du Code de la consommation prévoit jusqu’à 2 ans de prison et 300 000 € d’amende, des peines pouvant être alourdies pour les entreprises.

Le cas Poltronesofà : quand le marketing franchit la ligne

En 2022, la marque italienne Poltronesofà s’est retrouvée dans la tourmente après avoir abusivement utilisé l’expression "fabrication artisanale italienne" dans ses publicités françaises. Or, une enquête de la DGCCRF a révélé que bon nombre de ses canapés étaient en réalité fabriqués industriellement en Roumanie ou en Chine, et non à la main, encore moins en Italie.

Cette affaire a donné lieu à une sanction exemplaire : une amende de 400 000 € pour pratique commerciale trompeuse, visant à rétablir la confiance du public dans les appellations valorisant le savoir-faire.

Ce cas illustre bien l’importance de vérifier la véracité des termes employés dans sa communication. Car au-delà de l’image, c’est la transparence envers le·la consommateur·rice qui est en jeu — et la loi ne laisse que peu de place à l’approximation.

Artisanat : quelles obligations pour utiliser ce terme ?

Le mot "artisan" n’est pas un simple argument marketing. En France, il est protégé par la loi, et son usage est réservé à celles et ceux qui répondent à des critères bien précis.

Inscription à la Chambre des Métiers

Pour se revendiquer comme artisan ou artisan·e, il faut être inscrit·e au Répertoire des Métiers auprès de la Chambre de Métiers et de l'Artisanat (CMA). Cette démarche est obligatoire pour les entreprises exerçant une activité artisanale à titre principal ou secondaire.

Statut d’artisan ou d’artisan·e d’art

Le titre d’artisan·e est attribué automatiquement après 3 ans d’activité. Pour l’obtenir plus tôt ou bénéficier du titre d’artisan·e d’art, il faut pouvoir justifier d’un diplôme reconnu (CAP, BMA, DMA...) ou de compétences professionnelles avérées. Certaines disciplines artistiques ou manuelles donnent accès au label "Artisan d’art", inscrit dans une liste officielle de métiers.

Transparence sur les matières et la fabrication

Être artisan·e implique aussi une exigence de clarté : la provenance des matières premières, le lieu de fabrication, ainsi que le niveau d’intervention humaine doivent être clairement mentionnés. Utiliser des éléments importés ou semi-industriels n’est pas interdit, mais il faut en informer la clientèle. L’objectif : ne pas induire en erreur sur la nature artisanale du produit fini.

Et les outils de poterie Axel & Bois alors ?

En tant qu'entreprise artisanale, nous sommes bien évidemment inscrit au Répertoire des Métiers auprès de notre CMA. Nous avons aussi le label d'Artisan d'Art pour notre activité de tabletterie. Nous ne prétendons pas fabriquer nos outils à la main, car nous utilisons des machines mécaniques (des scies en tout genre, une raboteuse, etc.) et nous avons un petit laser. Les outils de poterie sont produits en petite série et ce sont bien des humains qui façonnent le bois, il n'y a pas de processus automatisé, on peut donc parler de production artisanale française.

Et sur internet ? Que peut-on écrire dans ses fiches produits ou ses posts ?

Sur le web comme ailleurs, la loi s'applique. Les mots choisis dans vos fiches produits, vos posts Instagram, ou sur votre site de vente doivent être justes et vérifiables.

Bonnes pratiques pour les créateur·ices honnêtes

• Précision : Évitez les termes vagues comme « fait main » ou « artisanal » si vous ne réalisez pas vous-même l’essentiel de la fabrication. Privilégiez des formulations claires, comme : « assemblé à la main en France à partir de pièces tournées » ou « conçu à l’atelier avec des éléments usinés localement ».

• Clarté : Détaillez ce que vous faites vous-même et ce qui est sous-traité (par exemple : « pièce réalisée à l’atelier, montage du mécanisme confié à un artisan voisin »).

• Preuves : Montrez votre travail ! Les photos en cours de fabrication, les vidéos d’atelier, ou les explications techniques renforcent la crédibilité de votre démarche. Ce sont aussi des contenus très appréciés du public.

  
  

Mentir, exagérer ou enjoliver son processus de fabrication peut sembler anodin, mais cela constitue une pratique commerciale trompeuse. En cas de signalement, vous risquez une sanction… et la perte de confiance de votre clientèle.

Employer des mots comme artisanal ou fait main n’est pas anodin : ces appellations sont encadrées par la loi et engagent votre responsabilité. Mieux vaut être précis·e, transparent·e et rigoureux·se plutôt que risquer de perdre la confiance des client·es… ou d’écoper d’une amende. Être honnête, c’est aussi ce qui fait la valeur de votre travail.